Au port de Kiri, sous un kiosque entouré d’échoppes, un homme, assis sur une chaise relevée, les jambes en l’air posées sur le garde fou, dormait sous son chapeau posé sur sa tête. Dans sa bouche qui laissait parfois échapper quelques ronflements, se tenait entre ses lèvres une cigarette allumée, consommée à moitié sans avoir une seule fois était utilisée. Le couvre chef, tout aussi élégant que disgracieux, était fait de pailles, rendant plus que typique cette pièce qui sans difficulté arrivait à couvrir les yeux grands ouverts du dormeur qui à travers les nombreux espaces que laissait la paille mal tissée regardait attentivement une bande de matelots. Ces hommes revenus d’un long voyage déchargeaient tout en parlant bruyamment de grosses caisses qui de temps à autres trahissaient la présence d’un quelconque trésor par les cliquetis d’objets métalliques, surement d’or. Sozu, matelots et aventuriers, était au courant de tout dans ce port et, jamais rien ne lui échappait surtout lorsque quelques abrutis pensaient pouvoir faire passer en douce quelques pièces rares sans en faire part au caïd des docks qui à chaque passage illégale de n’importe quel paquet recevait toujours un graisseux pourcentage.

Hé les gars ! Je crois qu’on s’est fait choppé ! dit un des matelots en montrant du doigt quelques chuunins qui s’hâtaient dans leur direction.

La réaction fut instinctive. Alors que les matelots déchargeant les marchandises s’enfuir dans tous les sens avec le plus de caisses que possible sous les bras, ceux restés sur le bateau le détachèrent du quai, espérant prendre le large avant l’arrivée des ninjas qui prirent beaucoup moins de temps que ne le pensait cette bande d’apprentis. Les fuyards restés sur le port furent pris en chasse pas les ninjas qui n’allaient pas tarder à les rattraper tandis que ceux qui essayèrent de prendre la mer virent avec désarroi leur bateau se faire envahir de représentants de la loi. Sur le quai alors paisible, une soudaine agitation pris place. En effet, ces matelots n’étaient pas les seuls à cacher quelque chose et la visite de représentants de l’ordre entraîna la fuite de tous les occupants de la place. Profitant alors de cette cohue, l’homme endormi, d’un bond, sortit de son kiosque pour se diriger à pas lents vers les cargaisons restées à terre. D’un geste précis, il fut sauté le couvercle d’une caisse et vit avec joie son butin : un magnifique vase de porcelaine datant d’une bonne dizaine de siècles et qui valait autant de Ryos que la petite culotte de la secrétaire du Mizukage. Refermant la boîte, il la prit sous son bras, s’enfonçant dans la foule à la barbe des marins capturés et des ninjas.

Et ben dis donc, la pêche a été bonne aujourd’hui ! dit-il tout en soufflant une bouffée de fumée.

Ce genre d’actions étaient quotidiennes car tous les jours, des tonnes de marchandises arrivaient au village et très peu d’entre elles étaient annoncées aux autorités et à chaque fois que certains évitaient Sozu, il les rappelait vitement à l’ordre en leur rappelant qu’il était toujours possible, comme aujourd’hui, d’avoir à la fois l’occasion de récupérer son du tout en les donnant une bonne leçon. Comme si les ninjas de Kiri étaient foutus de régler un problème comme celui-ci par eux-mêmes ! Ils étaient bien trop inefficaces ! Et maintenant que le voleur avait eu ce qu’il voulait, il ne lui restait plus qu’à aller vendre ce ridicule vase qui à ses yeux avaient pour seul importance son prix. Tranquillement, il se dirigea donc en direction d’un receleur connu par très peu. En effet, celui-ci était au courant de tout et jamais, oui jamais, quelque chose lui échappait.

Et tandis que l’homme posait son butin sur le sol, le vieil homme lui tendit un étui ancien. Fais d’un bois rare recouvert d’une laque rouge, l’étui semblait contenir un objet de valeur. Et en plus des nombreuses décorations qui ornaient le conteneur, une lourde cordelette dorée serrait fermement le couvercle sur lequel était gravée une patte de chat d’or. Le brigand qui était des plus extasiés par une telle splendeur ne put détacher son regard cupide sur cet objet qui n’avait plus aucun secret pour lui. Ce que lui tendait son ami le receleur était la mythique carte qui menait à l’île perdue où se trouvait le Dojo dans lequel reposait le rouleau d’invocation des chats, au milieu d’un trésor d’une valeur inestimable. Pendant longtemps il avait cherché vainement cette carte, comme de nombreux chasseurs de trésors, mais il n’avait jamais eu en sa possession quelque chose d’aussi déroutant que cette vieille carte qui lui mènerait à un futur prometteur. Avec impatience, il essaya d’arracher le couvercle de l’étui mais en vain. Ce morceau de bois décoré était plus solide qu’il en avait l’air ! Mais notre aventurier n’abandonna pas et ce fut avec un effort colossal qu’il essaya de séparer le couvercle de l’étui, en vain une fois de plus. Lassé et fatigué, il se laissa tomber dans un pouf qui se terrait entre deux coffres débordants d’objets exotiques. Son trésor toujours en main, il y posa un regard interrogateur, demandant à cette mystérieuse boîte le secret de son ouverture.

Wow ! C'est juste impressionnant tous ces trésors amassés ! Et si ça se trouve, le rouleau du chat est quelque part ici !

Lorsque ses mots se firent entendre dans la tente, la surprise fut la première à prendre part à l’entretien. Les deux hommes s’échangèrent un rapide regard, ils étaient à la fois étonnés et effarés par cette fantomatique déclaration, prononcée par d’invisibles lèvres. Mais lorsqu’enfin la raison leur revint, les deux hommes comprirent qu’il n’y avait rien de surnaturel à la situation. Même si il n’était pas rare de croiser des rats dans cette cache et qu’il n’était par contre pas banal d’en entendre parler, Sozu avait reconnu cette voix, c’était celle qui plutôt l’avait sommé de se rendre, la voix de Myjasu le chunin. Rapidement, l’intrus fut localisé, bien à l’évidence sur une caisse. Le vieux receleur, par pur formalité, s’était saisi d’un vieux sabre qui traînait et le brandit, fourreau toujours présent. Ce vieil homme avait malheureusement atteint un âge avancé et malgré certains talents, l’âge avait quand même eu raison de lui et certaines de ses aptitudes s’étaient rouillées, notamment celle du maniement des armes. Par contre, le brigand resta quiet, conscient qu’il n’avait rien à craindre de ce ninja qui même si avait réussi à le suivre ne présentait aucun danger pour eux. Certes il avait découvert la demeure du receleur, mais pouvait-il se vanter d’avoir déniché un homme dont les services étaient même demandés par les autorités du village ? Tout ce qu’il voyait là n’intéressait guère les autorités de Kiri, elles savaient déjà ce qu’il en était. Et si par hasard l’adolescent s’amuserait à faire la loi de quelque façon, ce serait à grands coup de pompes que Sozu l’enverrait valser car même si son statut de ninja le protéger, le brigand était quand même en droit de repousser cet intrus hors de son chez son ami. Et tandis que l’hôte continuait de brandir fébrilement l’arme, l’homme repensa aux mots du jeune homme, qui mentionnaient une partie du trésor que recherchait le chasseur : le rouleau des chats. Et pour faire court, sans lui demander d’autres informations qui pourtant seraient plus adaptées à la situation, Sozu opta pour aborder ce sujet qui les intéressait tout deux.

Qu’est ce que tu sais sur le rouleau ? demanda-t-il d’un ton menaçant.

Lorsqu’enfin l’intrus se daigna de répondre à la question de Sozu, celui-ci fut quelque peu surpris de voir qu’un ninja du village avait en sa possession de telles connaissances. Lui qui avait passé ces dernières années à courir après de maigres informations se trouvait face à un jeunot qui en savait autant. Le pirate fut à la fois intéressé, du fait d’avoir de la concurrence sur cette affaire et dépité d’apprendre qu’un si jeune homme avait amassé autant d’informations que lui. Mais en tant que bon filou, le bandit savait qu’il n’aurait rien à gagner s’il ne la jouait pas fine avec ce bon petit soldat. Il ne craignait certes pas ce ninja en lui-même mais plutôt ceux qui se trouvaient au dessus de lui, c'est-à-dire les autorités du village qui n’accepteraient surement la perte d’un de leur gentil toutou. S’ils allaient être à deux sur cette affaire, ce qui semblait bien être le cas, le chasseur de trésor se devait alors de faire entrer Myjasu dans ses plans. Cela ne plairait surement pas à quelques uns d’apprendre que leur chef traîne avec des chiens de Kiri mais, avait-il réellement le choix ? Comme dis auparavant, Sozu n’avait rien à craindre de ce garnement en lui-même mais ne pouvait se permettre de simplement faire disparaître cet obstacle comme s’il ne s’agissait là que d’une vulgaire porte bonne à être forcée.

Soudain, alors que l’homme était plongé dans ses pensées, il entendit un cri de terreur, qui fut poussé par son ami le receleur qui, dans un geste empli de dégout et de terreur, envoya son sabre de l’autre côté de son tente, parmi quelques vieilles babioles qui ne supportèrent pas le choc. Avant de se briser contre le seul, de vieux vases poussèrent leurs derniers cris d’agonis qui raisonnèrent dans toute la tente, surprenant les occupants. Et après cette étrange scène, le calma revint, reposant un voile tranquillité sur l’intérieur.

Je vais être direct, je suis assez pressé, lança Sozu au jeune ninja. Je cherche les trésors que protègent le dojo, tu cherches le rouleau, on fait un deal ?

Sa proposition résonna dans toute la pièce, comme s’il avait s’agi là d’un glas, qui installe après son chant un lourd silence que personne n’ose braver. Etait-ce si inconcevable que cela que le prince des voleurs de Kiri se retrouve à louer les services d’un ninja du village ? Après tout, cet homme qui avait pendant longtemps combattu plus fort que lui n’avait-il pas le droit une fois dans sa vie d’humain de se cacher quelques instants sous le même toit que son adversaire ? A son avis, il en avait droit mais cela ne sembla pas être l’avis de son ami qui, après s’être remis de sa frayeur, resta stupéfait de cette déclaration, laissant lourdement tomber sa mâchoire inférieure. Il semblait bien que le peuple n’avait pas le même avais que le prince…

Mais, la faim justifie les moyens. En tout cas, ce fut l’excuse que se trouva l’homme au rouleau qui ne s’attarda pas plus longtemps sur la mine de son ami. Maintenant qu’il avait commis le pire, il pouvait aller plus loin. Tranquillement, il sortit de l’une de ses poches sa dernière cigarette et la porta à sa bouche avant de l’allumer. Il tira quelques bouffées d’air puis recracha silencieusement une épaisse fumée qui inonda toute la pièce.

Alors ? demanda-t-il tout en se débrouillant pour ne pas faire tomber sa dernière cigarette.