Evening - Naruto

La pluie ayant baigné Kiri no kuni toute la nuit s'était dissipée, ne laissant de son passage que ses habituelles marques sur le sol, et d'excessives réserves d'eau que ces terres ancestrales avaient pourtant trouvé le moyen d'évacuer vers la mer, comme toujours. Heureusement, d'ailleurs, sans quoi le pays serait depuis longtemps noyé sous les inondations! Et comme la terre, ses habitants s'étaient habitués et adaptés au climat, qui faisait partie de leur quotidien. Certains avaient quitté le pays, fuyant son humidité trop constante à la recherche d'autre chose, de soleil, d'éclaircies trop absentes à leur goût ici, mais le reste du peuple kirien s'était fait une raison, et faute de laisser place au découragement, ils avaient appris à aimer ce pays et à y vivre malgré ces conditions difficiles. L'on pouvait reprocher sa pauvreté au pays de Kiri, son trop-plein d'humidité, et bien d'autres choses, mais jamais l'on ne pourrait reprocher un manque de courage à son peuple. Quand ce n'était pas la guerre ou la famine qui ruaient dans le creux des genoux de ces pauvres gens pour les obliger à flancher, c'étaient la politique, les désaccords entre villages sur l'île, un Mizukage incapable d'assumer correctement et durablement ses fonctions, ou d'autres problèmes encore. Et pourtant, bien que souvent à genoux, ce peuple se relevait, encore et encore... Il ne leur manquait qu'un bon dirigeant pour se relever pour de bon, et ce chef tant espéré, peut-être Kiri l'avait-il enfin trouvé en la personne de ce nouveau Mizukage, Arane Tashira. Même si peu osaient le montrer ouvertement, sans doute de peur d'être ensuite déçus, beaucoup plaçaient leur ultime espoir en cet homme...

La brume... Cette sensation de fraîcheur et de mystère enveloppant et protecteur... Elle ne rassurait pas tout le monde, ne plaisait pas non plus à tout un chacun, cette humidité par trop constante en ces lieux, mais la petite fille en kimono qui déambulait au travers de cette dernière en cette matinée printanière l'appréciait, elle. Ses longs cheveux d'une flamboyante couleur rubis ondulaient au gré du vent, dans sa course folle sur cette plage, dans la baie de Katuga, tandis qu'elle semblait s'entraîner à l'un ou l'autre exercice de vitesse, son regard couleur soleil fixant l'horizon, vers lequel elle semblait se diriger, avec détermination, une petite moue de concentration aux lèvres. Le froid rosissait ses joues tandis qu'elle fonçait à une telle allure qu'elle en devenait difficile à suivre du regard pour quiconque aurait traîné dans le coin... Car la jeune Kahera, petit prodige malgré ses dix ans à peine, ne s'entraînait que très rarement au vu de qui que ce fut. Elle avait choisi cette heure matinale et cette plage inhabitée, proche de la partie habitée de la Baie de Katuga, mais généralement déserte à pareille heure, pour s'entraîner aujourd'hui à l'utilisation de son don secret, le Mienaï.

Hésitant un moment, elle se dirigea vers l'eau, y poursuivant sa course tout en maintenant actif ce jutsu salvateur lui permettant de marcher sur la surface aquatique. Elle possédait bien des talents et du courage, élève modèle qu'elle était à l'académie malgré son choix tout particulier de ne jamais se battre quitte à obtenir un zéro pointé dans les matières le nécessitant et passant dès lors tout juste ses examens grâce aux points accumulés dans les autres matières... Mais si la théorie, la médecine, l'esquive et d'autres talents encore ne lui faisaient guère défaut, la petite fille ne connaissait aussi que trop bien certaines de ses lacunes. Et l'une d'elle, terrible pour un habitant de cette île, était qu'elle ne savait pas nager. Ses parents n'avaient pu lui apprendre à se mouvoir dans l'onde aquatique, en étant eux-mêmes incapables. Les cours de l'académie n'englobaient pas cette compétence, quant à eux, sans doute parce que l'on s'imaginait que nager fut inné pour un kirien? Et l'enfant n'avait que peu d'amis proches, plutôt solitaire, trop différente des autres, pointée du doigt par les autres gosses de son âge, tandis que les adultes se partageaient entre inquiétude, intérêt ou mépris à l'égard d'une aspirante aussi étrange dans ses aspirations et qualifications...

Un pas, deux pas, trois pas... C'était bon. Ce jutsu de marche sur l'eau, heureusement, elle le maîtrisait maintenant bien. Dans le doute, cependant, Kahera préféra rester là où, si le jutsu venait à échouer, elle aurait largement pieds. Plus ou moins rassurée, l'enfant continua sa course folle, s'apprêtant à faire demi tour sous peu, approchant de la zone habitée de la Baie de Katuga, quand un bruit sourd non loin la fit sursauter et se retourner. Là, un peu plus loin sur la plage, derrière cette maisonnette en bois... Quelque chose était tombé d'un arbre...? S'approchant, Kahera observa les alentours, prudente de nature, tout en rendant actif son Meni Mienaï, devenant totalement invisible et indétectable à quiconque se trouverait dans les environs, pour découvrir... un jeune garçon, apparemment blessé, qui pleurait. Mais sa douleur semblait bien plus profonde que celle causée par ce qui semblait être une cheville foulée...

"Ne bougez pas, je vais vous soigner."

Elle avait réapparu, dans son dos, avant de s'accroupir doucement auprès de lui, posant déjà ses mains sur la cheville blessée, avec une infinie douceur, tout en fermant les yeux et en incantant un Kaiseki Ken'shin no Jutsu afin de diagnostiquer exactement ce dont souffrait le membre blessé. De trois ans sa cadette, la jeune Kahera ne connaissait pas vraiment Kenji. Tout au plus avait-elle du le croiser quelquefois à l'académie ou sur le chemin menant de cette dernière aux habitations du petit peuple du village. Peut-être avait-il davantage entendu parler d'elle, en revanche, cette gamine étrange qui refusait de se battre malgré ses très étonnantes capacités et que beaucoup, faute d'approcher, montraient du doigt. Lançant alors un Shousen no Jutsu pour soigner la cheville foulée, la petite fille rouvrit ensuite ses grands yeux d'or et lui sourit avec une tendresse presque étrange. Sur un ton aussi doux et gentil que ne semblait l'être sa jeune interlocutrice, elle s'adressa à nouveau à lui, tout en lui tendant une main secourable pour l'aider à se relever, sa cheville miraculeusement guérie ne lui faisant plus le moindre mal.

"Vous pouvez marcher, Ryûzoji-sama?"

Ils ne se connaissaient pas. Pourtant, elle venait de l'appeler par son nom. Sans compter ce "sama", que l'on utilisait généralement en signe de respect de ses aînés, de ses supérieurs. Pourquoi diable cette gamine l'appelait-elle ainsi? Et d'où connaissait-elle son nom??? Loin de se soucier de pareilles interrogations qui devaient perturber le jeune Kenji, pourtant, Kahera se contentait de lui tendre la main, souriante et douce, cet air de bonté, de gentillesse presque trop pure se dégageant de toute sa petite personne sur cette plage trop grise, trop froide, et pourtant ensoleillée de cette présence chaleureuse et accueillante.

Evening - Naruto

D'abord muet, sans doute encore trop perturbé par les sentiments responsables de ses larmes amères, le jeune garçon n'avait rien répondu, fixant la petite Kahera avec perplexité. Puis, se reprenant plus ou moins, il avait enfin ouvert la bouche, bafouillant un peu, cherchant sans doute ses mots dans la confusion de son esprit troublé.

"... M... Merci. J... Je suis tombé et... Merci."

Toujours penchée au-dessus de lui, la petite fille en kimono lui adressa son plus adorable sourire dès qu'elle l'entendit. Ce n'était plus seulement un sourire doux et compatissant, mais également un sourire empli de joie et de gaité. Pas comme si elle se moquait de lui, de sa condition, de son malheur ou des circonstances, non! Mais un sourire empli de tant de positivisme qu'elle semblait vouloir partager, encourageante, tandis qu'elle lui tendait toujours la main pour l'aider à se relever, à présent qu'elle avait soigné son mal. Son mal physique, du moins... Kahera se doutait bien que derrière cette blessure s'en cachait bien d'autres, plus profondes et difficiles à guérir, et davantage psychologiques que physiques, elles...

"Comment… Comment tu t'appelles ? Et... Pourquoi tu connais mon nom ? ... Je te reconnais mais je…"

Maladroit, l'adolescent s'était relevé, et faisait à présent face à sa jeune interlocutrice. Tout perdu qu'il était, le pauvre ne parvenait pas à aller plus loin dans sa tentative de dialogue, et Kahera, loin de s'en offusquer ou de se moquer, se contenta de continuer à lui sourire gentiment, tout en répondant à son interrogation bien légitime. Avant de répondre, néanmoins, elle parut un instant songeuse, comme si elle aussi cherchait ses mots. Si elle connaissait son nom, c'était entre autre et surtout parce qu'elle était aussi une espionne, du moins une apprentie espionne, du haut de ses dix ans. Ce don secret hérité d'elle ne savait trop qui lui permettant de se rendre totalement inrepérable, de se cacher, de fuir ou de poursuivre une cible sans se faire repérer mieux que quiconque, elle l'avait mis au service de son village, tout comme ses autres capacités. Bien sur, Kahera n'avait jamais dévoilé ce don au grand jour, et même ses employeurs et professeurs en ignoraient jusqu'à l'existence. Mais tout en restant aussi prudente que possible, la petite fille avait réussi à prouver ses capacités sans dévoiler son secret. Dès lors, ses supérieurs dans le village caché de la Brume s'étaient mis, après une brève hésitation face à son jeune âge, à lui confier toutes sortes de missions d'espionnage, dans un premier temps simples et sans grandes implications, dans le but de tester la gamine et ses réelles capacités. Parmi ces missions bénignes, elle devait régulièrement rendre un rapport complet sur divers shinobis et autres habitants de son village à ses chefs, et le jeune Kenji faisait partie de la famille d'une des personnes qu'elle avait du espionner ainsi... Et ça, bien sur, il était hors de question de le lui dire!

"Je m'appelle Kahera Tashibana. Je connais votre nom parce que moi aussi, je vous ai vu à l'académie. Je retiens beaucoup de noms, ça entraîne la mémoire! Et puis, je veux m'intéresser à tout le monde, pour mieux connaître les gens que je devrai peut-être soigner un jour. Sinon, je ne serai pas un bon médecin!!!"

Réponse détournée, mais pas fausse pour autant. Trop honnête pour mentir, Kahera venait de dire la vérité à son interlocuteur, sans pour autant trahir une autre partie de cette même vérité. Toujours souriante, elle enchaîna:

"Vous habitez où? Je vais vous aider à rentrer, si vous voulez. Même si je pense avoir réussi mon jutsu, mieux vaut vous reposer un peu, après ce genre de chute..."

Lui proposant son bras et son épaule en soutien au cas où il en aurait besoin, la petite fille au regard d'or et à la chevelure flamboyante lança un regard autour d'elle. La seule maison proche était cette cabane qu'habitait actuellement le jeune Kenji, seul. Kahera ne l'ignorait pas non plus. Un pincement au cœur, elle se demanda s'il était vraiment aussi seul qu'elle avait pu le découvrir à ce jour, depuis le décès de sa mère, ou s'il avait au moins un ou deux amis, à l'académie par exemple, sur lequel il pouvait compter... La solitude est un mal aussi douloureux, si pas davantage, que bien d'autres maux. La gamine ne l'ignorait pas, désireuse qu'elle était de panser autant les plaies physiques que psychologiques de ses patients, dans la mesure de ses possibilités. Mais pourrait-elle combler le vide d'un cœur aussi meurtri que devait l'être celui de ce jeune garçon, de trois ans son aîné, vivant seul et isolé du village dans cette lugubre cabane de bois perdue dans la grisaille de cette plage déserte...? La petite Kahera possédait un cœur énorme, et l'avait sans aucun doute sur la main. Mais son ambition dépassait hélas souvent ses capacités, dans ce monde de guerres, de sang et de douleurs, quand elle ne pensait qu'à ramener le soleil et l'espoir dans le cœur des âmes meurtries...

Manger. L'adolescent l'invitait à petit déjeuner chez lui, dans cette cabane qu'il habitait seul depuis le décès de sa mère, et où il n'avait, d'après ses dires, encore jamais reçu personne. C'était un honneur qu'il lui faisait, donc. Sans doute avait-il honte de son lieu de vie, de le montrer ainsi à une presque inconnue, et Kahera se doutait que là fut la cause du malaise évident de son interlocuteur. Pensive, elle se demanda quelle était la meilleure marche à suivre dans ce genre de situation. Elle ne voulait en aucun cas offusquer ou blesser Kenji. Son but était de l'aider à aller mieux, pas, certainement pas de l'enfoncer davantage dans un mal quelconque, qu'il fut physique ou même psychologique.

L'état de sa maison lui importait peu en soi; c'était davantage l'état de son occupant qui la préoccupait. Sa cheville était certes guérie, grâce à ce justu médical qu'elle était parvenue à maîtriser malgré son jeune âge. Le shousen no jutsu, dit "technique de la paume mystique", et le kaiseki ken'shin no jutsu, qui permettait de faire un diagnostic à l'aide du chakkra, étaient les deux seuls jutsus médicaux qu'elle maîtrisait à ce jour, du haut de ses dix petites années, mais c'était déjà beaucoup. Peu de medical nin pouvaient se vanter de les avoir maîtrisé si tôt dans leur jeunesse. La petite Kahera avait de quoi être fière d'elle. Et pourtant, elle ne se prenait jamais de haut. Bien au contraire, elle faisait preuve d'une humilité incroyable face à tout un chacun et qu'importe la situation. N'avait-elle pas d'ailleurs ajouté ce terme de respect du aux aînés à l'égard de Kenji, âgé de trois ans de plus qu'elle, "sama"? Pas qu'il eut un rang plus noble que le sien ou une quelconque histoire de ce genre. Non. Juste qu'il était son aîné, et que dès lors, elle estimait qu'il avait droit comme les autres à cette marque de respect de sa part.

Cependant, s'il était vrai que la jeune Kahera possédait plusieurs talents non négligeables, elle souffrait également de lacune dans sa formation, contrairement à ce que devait penser Kenji. Le suiton? La petite fille n'était jamais parvenue à en maîtriser les bases, et dès lors, elle n'avait pas non plus réussi à apprendre de jutsus suiton. Il ne lui restait plus que deux ans d'études à l'académie avant d'y passer l'examen final et d'obtenir ou non son diplôme de shinobi et son titre de genin. Mais l'obtiendrait-elle, avec cette grosse lacune pour un shinobi kirien, ajoutée à celle de son refus catégorique de se battre?

"Alors, je suis très honorée d'être votre première invitée, Ryûzoji-sama."

S'inclinant légèrement face à lui, malgré qu'il lui tournât presque entièrement le dos, elle lui avait répondu avec le sourire, sans arrière pensée moqueuse ou autre, simplement, honnêtement, et avec toujours cette indéfinissable note de douceur qui caractérisait l'étrange petite demoiselle. Optant pour l'acceptation de l'invitation, Kahera se promettait cependant de créer plus de liens avec ce garçon trop seul, s'il le souhaitait du moins, afin de le soutenir dans ces difficultés qu'il traversait, et de lui apporter quelque réconfort, de chaleur humaine dans sa trop lourde peine. Avançant à la suite de Kenji, elle souriait toujours, réfléchissant déjà à divers moyens d'égayer un peu le quotidien de l'adolescent. Elle se maudit d'ailleurs de ne l'avoir pas fait plus tôt. Bien sûr, elle ne pouvait pas soulager tous les maux du monde, et ses journées débordaient déjà de tant d'activités qu'elle trouvait bien peu de temps à consacrer à autre chose qu'à ses devoirs à la maison, pour l'académie, pour ses supérieurs qui l'entraînaient déjà à l'espionnage, à ses cours particuliers auprès des shinobis médecins de l'hôpital de Kiri, à ses heures d'entraînement en général, ... C'était déjà beaucoup pour une fillette de son âge, et l'on attendait tant de choses d'elle en plus de ce qu'elle-même espérait atteindre comme objectifs personnels, que parfois, cela semblait impossible à gérer pour une si jeune enfant.

*Il tient bien le coup, lui, malgré ses difficultés. Je dois tenir aussi! Je dois au moins tenter de l'aider. Sinon, si je n'arrive pas à l'aider, comment pourrais-je aider tous les autres?! Et puis, ce matin, normalement, j'ai une à deux heures pour m'entraîner... Je peux bien les passer avec lui. Après manger, on pourra toujours s'entraîner à deux s'il en a envie.*

Ce ne serait plus de l'entraînement au Mienaï, ce don héréditaire qu'elle gardait farouchement secret, mais elle pourrait toujours s'entraîner à autre chose avec le jeune Kenji, et rattraper plus tard l'entraînement au Mienaï, se disait-elle. Et puis, ce garçon semblait bien gentil, et la petite Kahera n'avait que peu de temps à consacrer à une quelconque camaraderie avec d'autres enfants. Sans compter que la plupart se montraient méfiants, jaloux ou distants à son égard, ce qui ne lui facilitait pas la tache pour se faire des amis. En général, tout le monde l'appréciait plus ou moins et elle n'avait pas d'ennemis au sens propre du terme, du moins pas encore. Mais sa situation, ce que la vie attendait d'elle au vu de ses capacités, son emploi du temps chargé, et le fait qu'elle soit si étrange et particulière au niveau de son nindo et de sa façon d'être la rendait fort seule, aussi, l'air de rien. Elle avait ses parents, ses professeurs, les camarades de classe, bien sur, mais ce n'était pas vraiment pareil. Et si ce garçon devenait son ami...? Bien que ses pensées premières consistaient à l'aider à aller mieux, un léger espoir enfoui pointait néanmoins le bout de son nez, dans le petit cœur de la fillette, à chaque fois qu'elle se retrouvait en compagnie d'un autre enfant ayant plus ou moins la même tranche d'âge qu'elle... Et s'il ou elle devenait mon ami(e)???

"Mais vous savez, je n'ai pas spécialement de don, enfin, je veux dire... Je reçois des cours en plus de l'académie, mais c'est surtout parce que je suis obligée. Sinon, je ne pourrai jamais suivre et respecter mon nindo. Les professeurs me disent que c'est pas un nindo de shinobi et que je ne pourrai pas le suivre. Alors je veux leur prouver que c'est possible, c'est tout. Même si personne n'y croit. Et même si c'est pas facile et que je dois beaucoup travailler. Vous aussi, vous travaillez dur, non? Quand on veut vraiment quelque chose, on doit s'accrocher, n'est-ce pas?"

Hokage Funeral Theme - Naruto

Tout en apportant à table ce qu'il avait pour petit déjeuner, Kenji s'adressait à nouveau à Kahera, répondant à la question de la fillette. Il semblait toujours mal à l'aise à l'idée de recevoir quelqu'un dans sa très humble demeure, mais la petite fille ne semblait pas le moins du monde prêter attention aux détails de pauvreté du lieu. Son esprit d'analyse ne chômait pas, et Kahera avait pertinemment remarqué et noté chaque détail de l'endroit et de ce qui le caractérisait, mais sans que cela ne soit visible, discrète petite espionne qu'elle était déjà. Ces informations lui serviraient peut-être plus tard, aussi les nota-t-elle toutes avec soin dans son esprit, mais pour l'heure, ce qui l'intéressait, c'était avant tout l'habitant, pas l'habitation.

"Travailler dur nous rendra forcément... Plus fort, pour défendre notre Village, le garder de tous les maux. Mais on en oublie les siens à force, je l'ai réalisé aujourd'hui..."

Oublier les siens? Que voulait-il dire par-là? Qu'à trop travailler et s'entraîner, l'on ne passait plus assez de temps avec sa famille, ses amis et autres proches...? Avait-il négligé sa famille aujourd'hui perdue, par le passé, et le regrettait-il maintenant qu'il ne l'avait plus et se retrouvait seul...?

"Travailler dur, c'est ce que j'essaye désespérément de faire. Mais je ne sais plus pourquoi me donner tant de mal, je ne sais plus où je dois placer ma confiance. Comment faire, lorsque l'on ne sait pas pourquoi se battre et pour qui donner sa vie, tu le sais toi, Kahera-chan ?"

Malgré son jeune âge, Kenji parlait presque comme un adulte, sans même s'en rendre compte, sans doute. Déjà trop blessé par la vie, ou plutôt, par la mort, l'adolescent semblait perdre tout espoir en ce monde trop cruel envers sa jeune existence. Triste pour lui, sincèrement compatissante, Kahera réfléchit, soucieuse de trouver des mots justes pour lui répondre, tandis que les traits de son visage enfantin exprimaient clairement cette douleur partagée qu'elle ressentait à savoir ce garçon si malheureux. Elle aussi savait se montrer fort mature par moment, même si elle n'était encore qu'une enfant. Lorsqu'on ne passe pas sa jeunesse à jouer avec d'autres gosses de son âge, quand la vie vous mets devant des situations trop difficiles, forcément, l'on est bien obligé d'y faire face. Alors, soit l'on devient en quelque sorte adulte avant l'âge, d'une certaine manière, soit... on sombre, on se laisse engloutir par la cruauté de ce monde, incapable d'y résister, trop faibles petites choses que nous sommes face à la persécution.

"Je ne sais pas... Il faut choisir quelqu'un, je crois, ou quelque chose que l'on aime plus que tout, et se battre pour ça. Il ne faut pas vouloir mourir, donner sa vie pour rien, mais il faut trouver ce qui est important pour nous et vivre pour cette chose."

Que dire d'autre? Et avait-elle là trouvé les mots justes? Pas évident d'en être sûre, pauvre gosse encore bien jeune qu'elle était, elle aussi. Mais Kahera savait qu'elle possédait une force que son jeune interlocuteur ne possédait pas, ou plus, du moins, pour l'instant. Elle avait une famille, et cette force de cœur et d'esprit toute douce mais ferme qui lui était si particulière. Elle possédait l'Espoir, et souhaitait par-dessus tout le partager à tous ceux qu'elle pourrait. Maladroite, affouillant un peu, elle tenta de concrétiser davantage sa pensée concernant le jeune Ryûzoji.

"Je sais que vous êtes tout seul, et c'est sûrement pas facile... Mais il ne faut pas rester seul. Si des gens ne vous acceptent pas, il faut chercher encore, et encore, pour en trouver qui vous respectent et vous aiment comme vous êtes, Ryûzoji-sempaï."

Belle vérité, mais piètre consolation pour ce gamin qui avait tout perdu. Se rendant compte de sa négligence, Kahera rosit légèrement, et quitte à risquer de dévoiler un secret, elle se risqua à ajouter:

"Et si personne ne vous reconnaît, moi, en tous cas, je sais que vous êtes quelqu'un de courageux, et je suis sûre que vous deviendrez fort un jour. Et si personne ne veut vous accepter, moi, je vous soutiendrai."

Timide à la pensée de ce qu'elle venait de dire et de la façon dont il aurait pu l'interpréter, la petite fille détourna le regard quelques secondes, avant de le replonger dans celui de Kenji. La gêne qui rosissait ses joues poupines ne devait pas laisser croire au gamin qu'elle eut dit cela en l'air, juste comme ça pour le consoler. Elle pensait sincèrement ce qu'elle venait de dire, et voulait qu'il le sache. Ainsi, il pouvait vérifier par lui-même la sincérité de sa petite interlocutrice, en lisant cette dernière dans le regard clair de la fillette.

Il ne pouvait savoir qu'en réalité, bien qu'ils ne se soient jamais fréquentés auparavant, elle en savait bien plus sur lui qu'il ne pouvait s'en douter. Il n'était pas la cible principale de cette mission qu'on avait confiée à la petite Kahera l'an dernier, mais ayant du espionner un certain temps la famille du garçon, elle en savait un petit bout sur lui aussi, au final. Et bien qu'elle n'eut évidemment pas le droit de divulguer à quiconque la raison de cette connaissance, elle tenait surtout et avant tout, en ce moment, à rassurer et encourager sincèrement ce petit shinobi découragé, quitte à ce qu'il se doute de quelque chose concernant sa faculté d'espionnage et ses missions secrètes, auxquelles elle devait ses connaissances le concernant...

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"Bien sûr, que ça me convient, Ryûzoji-sempaï!"

Comme si elle allait faire la moindre remarque ou même, oser avoir la moindre pensée médisante à ce sujet! A Kiri, peu de familles pouvaient se targuer de manger à satiété. Le luxe de repas gourmands ou même simplement équilibrés et réguliers n'appartenait pas à la plupart des habitants de ce pays trop souvent brisé et meurtri par les conflits. Seul le goût du sang et l'amertume demeuraient dans la mémoire des kiriens, généralement... Et si Kahera bénéficiait du minimum vital en matière de logement et de nourriture, ainsi que d'une famille équilibrée et aimante, ce n'était pas le cas de beaucoup, et elle le savait, pas celui de ce garçon. Il avait tout perdu, et alors qu'il recevait la petite fille chez lui, il pensait encore à ce genre de choses... Voilà bien la preuve qui faisait de lui un gars bien, et la jeune Kahera désirait sincèrement en apprendre plus sur lui, se rapprocher de cette personne, tant pour lui offrir son amitié que pour lui demander, indirectement, la sienne en retour. Au fond, elle aussi se sentait bien souvent trop seule pour une enfant de son âge...

Et puis, en apprendre plus sur quelqu'un en espionnant sa famille ne l'intéressait pas. Elle l'avait fait car telle avait été sa mission d'alors, pour ses supérieurs, et qu'elle ne pensait pas nuire à quelqu'un en ne faisant que s'informer. Là, ce dont avait envie la gamine, c'était d'apprendre à connaître Kenji, mais par son propre biais. Rien ne lui aurait fait plus plaisir que de pouvoir partager une amitié avec lui, découvrir ce qu'il aimait, ce qu'il détestait, ses aspirations, ses rêves, et l'aider à y accéder. Cela peut sembler étrange, d'aimer si facilement autrui et de vouloir partager dès la première rencontre une amitié durable, sincère et fortifiante, mais Kahera était ainsi. Le manque d'amis dont elle souffrait de par sa différence et le peu de temps qu'on lui accordait à vivre comme une enfant de son âge l'avait écartée de bien des liens. Pour une fois qu'elle rencontrait une personne semblant apprécier sa compagnie et qu'elle avait le temps, réciproquement, d'apprécier celle du garçon, Kahera désirait prolonger cet instant et fortifier ce lien, si ténu fut-il alors qu'il venait à peine de naître.

"Tu sais, ce n'est pas si simple, de faire tout ça. On n'a pas tous quelque chose à protéger de bien à soi. Et trouver cette chose peut prendre du temps, beaucoup de temps. Enfin, je crois... Je ne pense pas être quelqu'un de courageux en tout cas. Je ne peux qu'essayer d'entrevoir ce dont tu me vantes les bienfaits." avait-il dit. Repensant à ces mots-là plutôt qu'aux excuses du garçon quant à ses maigres ressources pour accueillir une invitée chez lui, Kahera se demanda quoi répondre pour qu'il ne perde pas espoir, sans pour autant se mettre en avant, elle, ce qui était bien la dernière de ses envies.

"C'est pas si difficile de trouver ce qu'on veut aimer, ce qu'on veut protéger, vous savez. Il faut juste... ouvrir son cœur. Même si vous ne connaissez pas les gens, vous pouvez avoir envie de les aimer et de les protéger. Parfois, on aime quelqu'un plus qu'une autre personne, mais on les aime quand même tous les deux."

Maladroite, Kahera ne savait pas trop comment lui faire comprendre ses propres sentiments. En somme, elle avait toujours aimé tout le monde. Ce n'était pas donné à tous d'être capable d'ouvrir autant son cœur, sans condition, à tout un chacun, mais du haut de ses dix ans, la petite fille possédait à la fois une grande force et une immense faiblesse en la personne de son cœur, si pur et en même temps, par ce même fait, si naïf. Elle ne pouvait comprendre que des êtres comme elle, il y en avait très peu, et que la plupart des hommes naissaient presque avec cette peur au ventre d'ouvrir son cœur à quiconque, l'exposant aux coups de personnes moins bien intentionnées...

"Je sais pas si vous comprenez... Je... Moi, j'aime tout le monde! Même ceux que je ne connais pas; je veux apprendre à les connaître, pour pouvoir les aimer!"

Un large sourire détendit ses lèvres, une honnêteté mêlée de pureté se lisant sans peine sur ses traits et dans son regard clair, tandis qu'elle exprimait ses propres sentiments au gamin. Exposant ce qui lui donnait cette force d'avancer, de vivre malgré les difficultés dans ce monde plutôt pourri, la petite fille lui ouvrait son cœur sans retenue, sans crainte aucune. Qu'il eut été mal intentionné, rien ne l'aurait empêché de la briser. Sans doute était-ce d'ailleurs le sort qui lui serait un jour réservé, à exposer pareille faiblesse, sans méfiance, à n'importe qui, dut se dire Kenji en écoutant et en observant la fillette... Et pourtant... Une personne capable d'offrir tant d'amour inconditionnel, c'était tellement rare, et ça faisait tellement de bien! Sans doute trouverait-elle des gens qui, avides de cet amour, la protégeraient en retour. C'était ce que l'on pouvait espérer de mieux pour elle, car dans le cas contraire, nul doute ne faisait que dans ce monde de sang et d'amertume, pareille existence n'avait pas sa place, et que tôt ou tard, la cruauté des hommes éteindraient la flamme de Kahera...

"Je ne sais pas grand-chose de vous, mais... J'aimerais bien devenir votre amie, si je peux, et apprendre mieux qui vous êtes. Comme ça, vous aurez au moins une amie, même si je suis peut-être trop petite pour ça...?"

Maladroite, elle rougit à nouveau légèrement, pas très à l'aise à l'idée qu'il interprète mal ses pensées, ses paroles, ses intentions à son égard. Tout ce qu'elle voulait, c'était éclairer la voie trop sombre de Kenji, tout en éclairant la sienne d'une amitié nouvelle...

Empli de gratitude et d'une fougue nouvelle et emplie d'espoir, le jeune Ryûzoji avait apparemment retrouvé le sourie, du moins pour le moment. Son enthousiasme ravit la petite fille au regard d'or, pétillant de gaité à la vue du renouveau vécu par son interlocuteur. Il acceptait son amitié, il était même heureux de partager ce lien avec elle, fut-il tout neuf. Le temps et les événements allaient faire évoluer ce dernier, et sans doute que tout ne serait pas rose tous les jours. Kahera en avait bien conscience. Mais elle n'allait pas s'en démoraliser, que du contraire. Cette relation serait sans aucun doute bénéfique, encourageante et enrichissante pour eux deux! Pour l'heure, cependant, elle pensait bien davantage à son bonheur à lui qu'au sien. Elle savait trouver la joie et la chaleur dans le cœur d'autrui, sachant ouvrir le sien facilement, elle. Trop, peut-être même, mais ça, c'est une autre histoire... Lui, en revanche, semblait éprouver davantage de difficultés à ouvrir le sien, et dorénavant, elle se jura de toujours être là pour l'y aider!

« J... Je ne sais pas... je n'ai rien de spécial à vous demander, Ryûzoji-sama... »

Souriant maladroitement, elle avait les joues toutes roses sous l'émotion du moment et de la scène qu'ils vivaient, de la création de ce lien tout nouveau, excitant, plein de promesses. Elle n'avait rien de spécial à lui demander... En revanche, il avait besoin de se sentir utile, comme tout être humain, tout comme elle. Et il l'était! Chacun peut être utile à autrui, s'il le veut. Il suffit de trouver sa place en ce monde, et de faire ce que l'on est capable de faire, de réaliser. Chaque être ayant des dons et capacités différentes, il y a toujours place pour tous, pourvu que chacun ait la chance de trouver au moins un être à qui ouvrir son cœur, et qui ouvre le sien en échange.

« Je devais m'entraîner, ce matin. Si vous allez mieux, on peut aller s'entraîner à deux, si vous voulez... »

Lui devait s'entraîner, comme tous les autres jeunes aspirants de leur âge, à tous les exercices demandés à l'académie, sans doute. Mais qu'importait. Ils feraient ce qu'ils pourraient ensemble, et pour le reste... S'il voulait attaquer, elle l'entraînerait à la vitesse et à la précision, car pour l'atteindre, il devrait se démener dans ces deux domaines. Mais jamais Kahera ne tenterait de lui donner le moindre coup, fut-ce pour s'entraîner, elle. Son nindo, c'était la non violence, la médecine, la guérison, panser les plaies, et non les causer. Finissant de manger ce qu'il lui avait offert comme collation, elle l'aida à ranger la petite vaisselle, avant de s'incliner devant lui, souriant toujours. Cet air doux ne semblait jamais quitter son petit visage rond et enfantin, pas plus que l'espoir qu'il lisait constamment dans ses grands yeux d'or. Étrangement, il y lisait de la reconnaissance, également...

« Moi aussi, je vous remercie. Vous êtes mon premier ami, à part des adultes... je n'ai pas le temps de jouer avec les autres enfants, et puis... Enfin... je suis contente que vous soyez mon ami. »

L'adorable sourire qui vint confirmer ces dires ne pouvait laisser aucun doute à Kenji sur sa sincérité. Les mots sortaient droit de son cœur, pour aller atteindre le sien. A peine établi, le courant passait déjà. La petite fille était encore faible, fragile, sans doute même, terriblement vulnérable à cause de ce don qu'elle avait, d'ouvrir ainsi son cœur sans retenue à tous. Mais c'était également là sa force, et, s'il veillait sur elle, lui, ainsi que d'autres qui apprécieraient la chaleur qu'elle avait à offrir, elle les protégerait aussi, à sa façon, en retour. Pas en frappant l'ennemi, pas en se battant, non. Mais elle n'hésiterait pas une seconde à risquer sa vie pour autrui. Kenji le sentait, ne pouvait en douter, malgré le peu de temps depuis lequel il la connaissait à présent. Elle ouvrirait peut-être assez son cœur à l'ennemi, même, pour le faire craquer? A la voir, ainsi, l'on pouvait se dire que seul le roc résisterait à pareille chaleur, et encore. Dans tous les cas, Kahera représentait une de ces trop rares personnes qui donne sans compter, qui ne vit que pour autrui, et qu'il faut protéger, car cette force du cœur la rend également, dans un même temps, extrêmement vulnérable face à quelqu'un de mal intentionné... Mais elle avait ce don de ranimer la flamme dans le cœur éteint des gens par trop blessés par la vie. Et aujourd'hui, c'était celui de Kenji, qu'elle ranimait. Sans doute ferait-elle de cette petite flammèche un grand feu de joie, les années à venir... Leur amitié ne pouvait leur apporter que de bonnes choses à tous les deux. Restait à espérer que la vie ne s'acharnerait pas trop sur eux et ce lien qui venait de naître...

Citation :

°¤ Evaluation ¤°

Kenji =) Je me permets désolée <_<. Une chose appréciable dans tes RPs, toujours d'actualité d'ailleurs, surtout avec ce personnage ou bien avec Yano ( d'ailleurs je crois que je te l'avais déjà dit dans une précédente validosh) c'est ce "caractère philosophique" dans tes textes. Ils sont très souvent posés, réfléchis.

Citation :

"Le temps sembla s'étirer, se distendre, comme si j'entrais dans une faille intemporelle qui me plongeait au plus profond de mes démons. "

> Je vais l'inscrire celle la ! / A mettre dans le livre d'Or (Kara comprendra n_n)

Tilika =) "Mais elle avait ce don de ranimer la flamme dans le cœur éteint des gens par trop blessés par la vie", je crois que c'est le "don" de tous tes personnages quelque part, à leur manière certes

11 points chacun