Le cimetière de Kumo Gakure no Sato. En fouillant bien, Kagami pourrait y retrouver son corps initial, certes sans doute composé uniquement d'ossements aujourd'hui, mais il était sensé être là dans tous les cas. Passant en revue les stèles mortuaires les unes après les autres, Kagami cherchait sans doute celles du clan Kuro'Udö, toutes rassemblées au même endroit. Akabane, de son vivant Shinobi de Kumo avait participé à cet enterrement massif, et Kagami, spectateur à l'intérieur du corps de son frère avait put observer la scène. Mais l'autre Kuro'Udö n'avait pas eut à remettre les pieds aux alentours de Kumo, ce depuis de très nombreuses années. Le moins que l'on puisse dire était que depuis tant d'années, le cimetière de la foudre s'était bien remplis, faisant perdre ses repaires au "Kyôji".

En ce début de matin d'été vers 4h30, il faisait toujours nuit, mais bientôt le soleil allait se lever, d'ici 45min environ. Désormais réveillé d'une torpeur infinie, Kagami n'avait pas une minute à perdre dans les exécutions des différentes tâches comblant son "plan". Tout était chronométré, millimétré, pas un jour à perdre, que dis-je, pas une seule seconde n'était de trop dans ce terrible emploi du temps diabolique que c'était fixé le "Kyôji". Les vestiges de son premier corps lui étaient absolument indispensables, et mettre la main dessus devait être fait dans les délais les plus brefs. Au fur et à mesure qu'il cherchait parmi les stèles mortuaires celle qui était la sienne, Kagami réfléchissait au meilleur moyen d'accomplir ses diverses plans. Peut-être se serait possible seul. Mais seul, ce serait bien trop long, peut-être bien dangereux qui plus est, même pour Kagami. Puis surtout...Tout faire seul, ne serait absolument pas amusant.

Finalement, la stèle de "Kagami Kuro'Udö". Posant un genou sur le sol, il déposa une main sur la terre encore mouillée de la rosée du matin, tandis que son autre main se plaçait sur la stèle sur laquelle son nom originel était gravé. En un instant, la stèle, aussi bien que le sol sous lequel était enterré le squelette, disparurent dans les cieux, emportés par la douce brise qui soufflait alors. D'une simple impulsion, Kagami les avaient transformé en poussière. Sous ses yeux, son propre squelette, dont les marques des terribles coups de son frère, dans leur ultime bataille, parsemaient encore les os. Laissant apparaitre un sourire sur son visage à cette vue des plus improbables, Kagami déposa sa main droite au niveau de la cage thoracique, comme il l'avait fait précédemment avec la stèle mortuaire bordant l'emplacement du corps. A son tour, le corps devint poussière. Cela dit, à l'inverse de ce qui s'était déroulé quelques instants plus tôt, cette poussière ne s'échappa dans au gré du vent, mais fut belle et bien emprisonnée dans la main de Kagami. Se redressant, il leva la tête vers le ciel, souriant, il le fixait comme si il regardait un grand être s'y trouvant.

~Et maintenant que je suis redevenu poussière...Que va-t-il advenir de moi? Bien sur que tu ne peux me répondre...Tu n'es qu'une chimère vivant dans le cœur des hommes trop crédules pour affronter la vérité en face. Redevenir poussière après sa mort, hein? Je suis pourtant encore là...Reste bien au chaud là haut, et admire le spectacle...Car désormais, les humains vont pouvoir vénérer une nouvelle divinité...Un être absolu...Portant le nom de Kagami Kyôji!~

Une présence se fit alors ressentir. Cette sensation, cette impression d'être apprécier chez les autres, Kagami l'avait attendue pendant 70 années. Lui qui adorait le contact humain, qu'il soit physique ou simplement oral, était bien mal tombé, enfermé à l'intérieur d'Akabane. En effet, le seul contact physique ou oral qu'avait le Kuro'Udö avec d'autres personnes n'était autre qu'avec leur sang, en les écoutant murmurer quelques bribes incompréhensibles, sur leur lit de mort. A vrai dire, Kagami était tellement convaincu intérieurement de son incapacité à être "vaincu" de manière définitive, qu'il se permettait avec aise certains actes, souvent jugés par beaucoup comme "suicidaires à souhaits". La jeune femme voyait devant elle, marchant lentement dans les airs, un grand gaillard blond, tout de blanc vêtu, souriant, avançant vers elle et sa monture avec assurance et légèreté. A chaque pas passés dans les airs, il semblait se rapprocher du sol, et rapidement, les airs semblaient comme se fissurer, comme si quelqu'un était derrière, et était en train de pousser pour passer au travers. Étrange sensation pourtant belle et bien réelle. A peine le pieds du grand blond toucha le sol que toute la façade du décor devant la jeune femme explosa en poussière, c'était comme si un miroir venait d'être brisé d'une manière assez uniforme, et dans cette poussière, un corps semblait se dessiner, et pourtant, alors qu'elle disparaissait sous le coup d'un vent léger, la poussière ne laissa place à aucun corps. Mais, sans s'y tromper, un léger souffle pouvait se faire sentir sur la nuque de la belle aux cheveux bleus. Derrière elle, à quelques centimètres à peine, assis sur l'invocation, un homme d'une stature moyenne, aux longs cheveux blancs, remarquablement fins, le tin mat. Il avait quelques tatouages sur le corps, remontant jusqu'à son visage fin, duquel on ne pouvait qu'être absorbé par ses yeux incroyablement clairs, contrastant énormément avec sa couleur de peau sombre. Remontant sur son nez sa paire de lunette, l'homme, d'un léger bond, descendit de lui-même de la bête, esquivant par la même un potentiel courroux de la jeune femme suite à une telle position. Souriant tel un ange à la bonté infinie, il ne tarda pas un seul instant supplémentaire à se présenter à la belle. S'inclinant légèrement en avant, une main dans le dos, l'autre sur son ventre, il laissa filer dans les cieux quelques mots.

~En cette douce matinée, l'on m'a procuré l'immense honneur de la plus sucrée des rencontres qui m'eut été donné de faire toute ma vie durant. Mes mots peuvent vous paraître déplacés à n'en pas douter, mais sachez que votre simple présence, en cette heure si matinale, n'a fait qu'éclairer ma journée d'une lueur intarissable, éblouissant tout mon être. Je me prénomme Kagami Kyôji, et veuillez bien croire que je suis tout à fait enchanté de faire votre connaissance.~

Le Kyôji faisait face à la belle jeune femme qu'était Mata Hari. Fixant ses yeux, souriant. A peine eut-il le temps de relever légèrement la tête que l'éventail de la femme aux cheveux bleues vint foncer en sa direction. Déplaçant son visage d'ange légèrement sur la droite, d'un habile mouvement furtif, Kagami put contempler l'éventail s'échouer dans les airs derrière lui, n'ayant aucune substance à heurter. Souriant, il était fier de la situation dans laquelle il se trouvait. Mata Hari était dans l'incapacité la plus totale à lui faire quoi que ce soit. Cette femme. Elle semblait vouloir montrer à Kagami qu'elle lui était supérieure, et ce dès le premier instant où ils se sont croisés, et de la voir ainsi, assise à répétition sur cette monture qui semblait n'être autre qu'une invocation, Kagami entrepris l'un de ses petits discours dont il a le secret. Il savait parfaitement où il voulait en venir. Il se recula légèrement avant de s'adresser longuement à la belle qui se tenait assise sur sa créature à quelques pas de lui.

~Quelle est la différence entre un roi et sa monture? Je ne parle pas des âneries du genre "l'un est une personne est l'autre est un animal" ou "l'un a deux jambes et l'autre en a quatre". Si leur forme, leurs capacités et leur puissance étaient exactement les mêmes, pourquoi est-ce que l'un dirige les combats alors que l'autre devient le cheval et porte le roi? Il n'y a qu'une réponse. L'instinct! Pour que des êtres identiques deviennent plus forts et amassent la puissance dont ils ont besoin pour être roi, ils doivent chercher plus de combats et plus de puissance! Ils ont soif de combats et vivent pour écraser, découper, dépecer sans merci leurs ennemis! Loin, loin dans nos âmes est enterré l'instinct primitif de tuer, de massacrer! Mais tu ne sembles rien avoir de tout ça. Je ne vois pas en toi ces instincts purs, basiques. Tu es le genre de personne se battant avec son cerveau, essayant de vaincre ses ennemis avec de la logique. Et ça ne marche pas, c'est comme essayer de les blesser avec une épée encore dans son fourreau. C'est pour ça que tu sembles à cet instant si faible. Je ne sais pas pour ceux qui te suivent, mais moi, je refuserai de porter un roi qui est plus faible que moi, pour me faire tuer avec. Si celui qui est au dessus de moi est plus faible, alors je le détruirai et porterai sa couronne.~

A peine eut-il terminé son discours que Kagami disparu à nouveau des yeux de la belle, pour se faire sentir tel un poids sur ses épaules. Sans même qu'elle ait le temps de réagir, il changea encore de position, évitant ainsi de se faire frapper. S'asseoir sur les épaules de Mata, comme pour lui signifier clairement "Je suis le roi". Kagami voulait clairement en venir quelque part avec cette femme, la question était de savoir où? Pourquoi ce discours? Il ne la connaissait pourtant absolument pas. Ne sait rien d'elle, et pourtant, un simple échange de regards peut dire tant de choses à ceux qui savent regarder dans le fond des yeux. Droit, fixant la jeune femme qu'il tutoyait désormais sans accord aucun, il avait les mains dans les poches de sa veste. Brisant le court silence qui venait de prendre place, Kagami parla à nouveau.

~Allez-vous me prouver que j'ai tord? Si oui...Je vous propose un petit jeu...Essayez simplement de me porter un coup par vous même, sans vous aider d'artifices extérieurs aucun, comme des invocations par exemple...Hum...Je vais moi aussi tenter de vous toucher en même temps. Le premier qui arrive à toucher l'autre aura gagné la partie. Je vous laisserez choisir le gain de votre choix, selon vos désirs. Mais si je gagne, vous devrez admettre que vous n'êtes que l'équivalent de mon cheval, et donc par conséquent que je suis votre nouveau "roi". Ce jeu vous-va-t-il? Ou avez-vous peur d'une petite rixe?~

Il s'était remis à la vouvoyer, comme pour insister sur son ton provocateur. Il avait fallu un rien quelques instants plus tôt pour la faire tenter de frapper Kagami, ces quelques mots devraient donc faire l'affaire. Restait à voir la réaction de la Kunoichi.

Dans ses yeux, le sourire de la belle femme aux cheveux bleus se reflétait presque amèrement. Kagami lui renvoyait la même image. Souriant à son tour, la voir ainsi était signe évident qu'elle allait prendre part à son petit jeu. Avait-elle ne serait-ce que la moindre chance de l'emporter? C'était difficile à dire après tout. Le moins que l'on puisse dire était qu'elle était puissante, enfin, c'était l'impression qui se dégageait d'elle, mais nullement le Kyôji était impressionné. Enfin, il l'était peut-être un peu, cette prestance était malgré tout remarquable, mais c'était comme si elle ne pouvait pas l'atteindre. Comme si, toute puissante soit-elle, Mata Hari, ou cette impression oppressante de puissance qu'elle dégageait ne pouvait pas atteindre Kagami qui était à un tout autre niveau. Les deux n'étaient qu'à une poignée de mètres l'un de l'autre. Mata Hari avait son grand éventail posé à côté d'elle, une main dessus, confiante, assurée, elle ne laissait rien transparaitre que la victoire dans le plus profond de ses yeux.

Il était tout aussi sur de lui que la jeune femme, et ce petit jeu allait déterminer lequel des deux a le plus raison à propos de ses propres capacités. Intentionnellement diminuée de par son interdiction de faire appel à ses Kuchiyoses, Mata était mise un pied en dessous de Kagami, et pourtant, il allait jouer avec elle, oui, le jeu du combat, le jeu de la vie, ce jeu si cher et si prisé chez Kagami, ce jeu qu'il affectionne tant. Depuis la fin de son discours, Kagami était immobile, n'esquissant pas le moindre mouvement. Apportant sa main à sa bouche, elle souffla dessus, laissant apparaitre sur l'aire de combat des milliers de plumes semblant directement tombées d'ailes d'ange. Kagami semblait toujours immobile. Ses lunettes remontées devant ses yeux ne laissaient pas filtrer l'ombre de ses yeux, ne laissant donc pas savoir si la technique avait eut le moindre effet ou non. Après tout...De simples plumes, peu importe la nature du chakra dont elles sont imprégnées, ne peuvent pas détruire une glace, n'est-ce-pas? Aussitôt, sans même savoir si sa technique avait marché ou non, Mata Hari empoigna son éventail, avec lequel elle avait vainement essayé de frapper Kagami plus tôt. Le coup allait être brutal, frappé de haut en bas, tout le poids de l'éventail allait se fracasser sur le crâne du Kyôji.

Etrange impacte qu'était cette dernière. Une sorte de sphère devant la jeune femme semblait se fissurer suite au terrible coup qu'elle venait de porter. Le corps de Kagami était lui aussi fissuré de toutes parts. Tout ceci n'était depuis le début...Qu'une simple image? Cette technique aurait été lancée dès l'instant où Kagami avait quitté les yeux de la jeune femme, après s'être posé sur elle? Cela voudrait dire qu'il avait prévu depuis tout ce temps la réaction qu'aurait la Jounin de Kumo. Ce fut une sphère de diamant intégrale qui se brisa en poussières en un instant, laissant apparaitre devant la belle, Kagami, accroupi sur une pierre surélevée. Les jambes pliées, genoux à hauteur du visage, sa main était posée sur ces derniers, titillant sa boucle d'oreille fétiche, unique détail vestimentaire qui ne changeait jamais de corps avec le Kyôji. Souriant, il regardait clairement Mata Hari de haut. Souriant, il était réellement fier de lui, et au vu de son visage jubilant, il était probablement impossible qu'il s'agisse d'une illusion quelconque.

Un instant plus tard, la Kunoichi ne chercha même pas à comprendre et ouvra intégralement son éventail, le plaçant largement sur sa gauche. Toujours tripotant sa boucle d'oreille, Kagami observait avec intérêt les mouvements de la jeune femme. Après tout, elle combattait pour démontrer qu'elle n'était pas une simple monture pour le Roi qu'était Kagami. Désireuse de lui prouver l'inversement des rôles sans doute, elle enchainait techniques les unes après les autres, jusqu'à présent n'arrivant hélas pas à atteindre le Kyôji semblant dans un autre espace, intouchable par des attaques humaines. Silencieux, il était comme un enfant s'amusant à observer des fourmis sous ses pieds se débattre pour leur survie. Un jeu, rien de plus. La Kunoichi entamait alors son terrible mouvement pour activer l'une de ses techniques Fuuton liée à son éventail, mais un terrible tintillement vint heurter ses oreilles en plein mouvement, bloquant ce dernier, gâchant littéralement la technique en cours d'utilisation. Les bras de la jeune femme tremblaient, prise de spasmes, la technique n'avait pas pu être lancée tout simplement. Souriant, Kagami adressa de nouveau la parole à Mata.

~Je suis presque déçu...Attaque moi pour me tuer, attaque moi pour gagner. Arrête de porter des attaques "pour ne pas perdre" et passe à l'offensive réellement. Ce petit jeu n'a aucun intérêt si tu ne prends aucun risque, n'est-il-pas? Mais je tiens à dire que je suis quand même satisfait...Car jusqu'à présent, avec ce que tu m'as montré, je suis convaincu que tu feras une superbe monture.~