Ce matin-là, en me réveillant comme à l'acoutumée assez tôt, j'avais senti une pointe de légèreté empreindre les 12 heures qui allaient suivre. Comme un pressentiment, qui n'engageait rien, une vague impression que de calmes péripéties allaient survenir. M'arrachant à mon lit, je jettais un regard un poil blasé par ma fenêtre brisée, d'où je pus apercevoir un ciel gris, pluvieux, déprimant à souhait. De légères goutelettes tombaient ci et là, parfois même s'insinuant dans mon intérieur par ses failles béantes, mouillant le sable nourrissant la terre de leurs bienfaits. C'était une journée où se laisser aller menait irrémédiablement à l'inactivité la plus totale... Dénué de mission, ces temps-ci, j'étais contraint de trouver mes occupations moi même, me perdant parfois dans des activités vides de sens.

Ce matin, en l'occurence, je décidais qu'un petit tour en Centre Ville me ferait le plus grand bien...



La pluie était d'un froid dérangeant, frappant sporadiquement ma nuque, créant alors de longs frissons qui se prolongeaient jusqu'en bas de mon dos. Le long du chemin qui menait à la civilisation du Village, je croisais déjà plusieurs personnes, semblant comme sortir d'un parc d'attractions, discutant avec entrain avec leurs amis, faisant de grands gestes. Je me demandais alors si je n'avais pas raté quelque chose aujourd'hui... Il y avait une fête en ville ?... Pas à ma connaissance en tout cas. Ce ne fut que lorsque j'arrivais au coeur du centre ville que je réalisais que l'on était tout simplement le Jour du Marché, très prisé de tous les villageois, quelle que soit leur classe sociale. Un mélange assez réjouissant de visages et d'attitudes, qui faisaient briller une belle diversité au sein de ce Village que j'aimais. Longeant alors les étales garnis de produits tous les plus alléchants les uns que les autres, j'évitais soigneusement de heurter qui que ce soit, dans le courant dense des passants.

Marquant quelques minutes de pause, je m'offrais un petit déjeuner, auprès d'un boulanger exposant en plein aire -courageux par le temps qu'il faisait-. Sans prétention, je lui fis part de mon "admiration" à l'égard de son courage, ce qui me valut de me faire offrir la confiserie ma foi fort délicieuse que je m'empressais d'engloutir en le remerciant.



Je continuais mon petit tour, saluant quelques habitants que je connaissais bien, élevant ma main parmis la foule pour me faire voir l'espace d'un instant. Malgré la pluie fine et omniprésente, je passais une matiné fort agréable, mais qui montra bien vite ses limites. Mon tour du centre ville achevé, je me préparais déjà à repartir dans le sens inverse, rentrer, pour... Je ne savais trop quoi. Mais un événement salvateur, si l'on peut dire, vint pimenter un peu cette journée qui bien qu'agréable sur le fond restait d'un banale affligeant. Alors que je déambulais parmis la foule, de derrière moi jaillit comme une flêche un homme, tout encapuchoné de noir. Il me bouscula assez violament, ainsi que plusieurs personnes autours de moi, filant à toute vitesse... Pressant le pas pour ne pas le perdre de vu le nerveux perturbateur, je remarquais qu'il était chargé comme une mule, portant avec lui une forme étrange dans les bras...

Il n'en fallait pas plus pour que, intrigué, je me lance à sa poursuite sans ménagements. L'homme était rapide, mais pas assez pour me semer. Slalomant un moment parmis les passants, je choisis assez vite de me hisser au niveau des toits, d'un bond, afin de pouvoir suivre la situation avec un plus grand champ de vision. L'individu semblait vraiment vouloir échapper à quelque chose, ou quelqu'un... Ses trajectoires n'étaient pas définies, il ne rejoignait pas un point précis, je pouvais le sentir en observant ses mouvements. Ou bien, il était drôlement doué pour brouiller les pistes...



Soudain, alors que j'amorçais une accélération qui me ferait intercepter l'homme fuyard, le bonhomme heurta de plein fouet un marchant itinérant, perdant presque pied au milieu d'une rue très fréquentée. Je ralentissais, curieux... L'individu reprenant sa course de plus belle, sans même prononcer un mot, je n'arrivais pas à définir ce qu'il pouvait bien faire à cette heure-ci, en agissant de la sorte... Mais un erzats de réponse me vint, sous la forme d'une gemme scintillante, qui attirait déjà les foules. Surgissant des toits, je stoppais d'une traite les élans pécuniers des passants qui se seraient surement battu pour obtenir l'objet, m'en saisissant moi même pour l'examiner... Pour une gemme, c'en était une. D'un rose pâle éclatant, je n'osais imaginer combien elle devait valoir en terme de Ryos... Reprenant ma course de plus belle, j'envisageais d'avoir à faire à un cas basique de larcin, dans lequel je devrais nécessairement appréhender l'homme qui détalait toujours plus vite au travers des rues de la ville.

Décidé cette fois-ci a arrêter sa course folle, je bondis en avant pour le stopper...

Sans même que cela soit même perceptible, l'homme encapuchonné venait d'augmenter singulièrement sa vitesse, slalomant avec plus d'agilité encore qu'auparavant. Sans doute avait-il repéré que je m'étais lancé à ses trousses. Je me dis alors qu'il aurait mieux fait de faire preuve de plus de précaution en passant en trombe à côté de moi, s'il avait vraiment voulu m'échapper... Qui n'attire pas l'attention est le meilleur des voleurs. En l'occurence, l'individu pouvait mieux faire, dans ce domaine. Mais je devais reconnaître une chose, le bougre était rapide... Intérieurement, j'espérais qu'il ai dors et déjà atteint son maximum, auquel cas ce voyou me forcerait à utiliser moi même le maximum de mon agilité urbaine.

Toutefois, ce ne fut pas nécessaire... Afin de le laisser se découvrire, je pris un peu de recule dans ma poursuite, ralentissant sensiblement mes sauts de toit en toit. Le but était simplement de pouvoir observer si oui ou non ce voleur avait une destination, en le faisant croire qu'il m'avait semé. Et, ma foi, cela fonctionna plutôt bien.



Nous étions toujours dans les ruelles du Village, dans une partie un peu excentrée, où ne circulaient que très peu de monde, lorsque je le vis tout bonnement ralentir, pour finalement entrer, les bras chargés de son butin, dans une habitation tout ce qu'il y avait de plus standard. Etrange... Moi qui m'attendait à une cachette souterraine, voir même à un bateau qui aurait quitté les lieux, j'étais assez surpris. Ou alors n'était-ce qu'un stratagème pour mieux s'enfuir ??... Un instant de plus à observer la porte qui venait de se fermer, et j'aurais peut être perdu le fruit de ma course semi effrénée. L'homme, j'en étais certain, était un voleur, alors pourquoi hésiter ? D'un bond, je m'élançais donc au devant de la porte, allant presque jusqu'à y toquer, par réflexe. Au lieu de ça, je pris une précaution qui pourrait peut être éviter à ce filou de me jouer un mauvais tour en resurgissant de l'appartement comme un lutin. Ainsi, je pus entrer l'esprit au clair...

La porte restée ouverte, je m'adressais directement à l'homme qui était après tout potentiellement le propriétaire des lieux, me positionnant au milieu de la pièce qui s'ouvrait à moi:



"Excusez-moi... Monsieur ? Vous allez devoir me suivre jusqu'au poste de police, j'en ai peur , dis-je en montrant brièvement la gemme rosâtre restée jusque là dans ma sacoche, puis la rerangeant. Vous êtes en infraction des lois de ce Pays... Me suivrez-vous gentillement ?"


Intimement, j'espérais presque qu'il me forcerait à utiliser un peu de ressources pour l'appréhender. Cette journée était si basique qu'il m'en arrivait d'être stupide... Toutefois, qu'allait vraiment me reserver l'individu ?

Face à moi, le voleur savourait son larcin, ne doutant de rien... Alors que je l'interpellais avec le plus de prestance possible, il se retourna vivement vers moi, un air surpris inscrit sur le visage. Peut être ce petit piège que je lui avais tendu était-il de trop, étant donné la jugeotte que je lui accordais, à vu de nez. Mais mieux valait rester prudent, pas vrai ? Mais, alors que je croyais l'affaire sur le point d'être bouclée, un élément inattendu fit son entrée. Le jeune voleur sembla fixer quelque chose derrière moi, avec une attention toute nouvelle, presque comme s'il redoutait cette chose encore plus que l'autorité -toute relative- que je représentais. La sensation d'une autre personne derrière moi se fit alors clairement ressentir... Un complice ? Jettant un coup d'oeil furtif dans mon dos, en ne quittant pas de l'autre le jeune homme, j'aperçus une stature on ne peut plus taillée pour le combat, de larges épaules, arme au côté... Erf, ça allait se compliquer il semblait.

Mais je regrettais assez vite d'avoir tendu ce fil de fer à l'entrée. Car l'homme, tout bélliqueux qu'il semblait être, ne parut pas pour le moins du monde en accord avec l'objet de la poursuite engagée plus tôt. Et alors que je commençais à entrevoir la nature des rapports unissant les deux compères, tout se passa trop vite pour que j'ai le temps d'intervenir...



L'homme à la forte stature, de tout son long, tomba au sol, s'entremêlant les pieds dans le piège destiné à son camarade, provoquant un lourd fracat qui fit trembler la structure jusque dans ses combles. Se relevant, le nez en sang, il ne semblait plus aussi conciliant qu'il y a peu... Aïe, j'avais mal jaugé la situation apparemment... Ou bien avais-je à faire à un de ces scénarios alembiqués durant lesquels on ne pouvait rien voir venir ? Bonne question. N'en restait pas moins qu'il fallait fournir des explications, tout en gardant la situation sous contrôle.



"Hreum... Sincèrement désolé, Monsieur...? Il n'était pas prévu que ce soit vous qui chutiez ici. Votre ami, ici présent, s'est rendu coupable de vol caractérisé, et m'est avis, également de délit de fuite. Je suis ici pour l'emmener au poste, afin qu'il réponde de son délit, si petit soit-il en comparaison d'un meurtre... Une opposition à cela, Monsieur, ou devront nous argumenter encore... tous les trois ?"



Etant donné les circonstances et les natures plus que floues des protagonistes, je campais sur mes appuis, prêt à tout, à bondir, esquiver un projectile lancé par dépit de l'arrestation inévitable... N'importe quoi qui serait inattendu. Faisant quelques pas sur le côté, je pus garder un oeil sur les deux jeunes gens , les jaugeant du mieux possible afin d'éviter une quelconque bavure. Toutefois, je laissais battre mes bras le long de mon corps, filtrant toute attitude méfiante qui pourrait transpirer de moi, assumant tout simplement mon rôle actuel de justicier du dimanche... Après tout, je ne faisais que mon devoir... Non ?

Face à la scène presque loufoque à laquelle j'assistais, je m'efforçais tout de même de garder un maximum de sérieux et de concentration. En effet, on n'était jamais à l'abri de brigands aux tendances de beaux parleurs, qui feintaient pour mieux s'enfuir dans la seconde suivante. Toutefois, il ne semblait pas cette fois-ci qu'il s'agisse de ce genre de personne. Le jeune homme que j'avais poursuivi jusque dans l'habitation modeste du centre ville apparaissait être le petit frère du malheureux s'étant prit les pieds dans mon piège précipité. Lui même semblait arborer une expérience certaine du combat, me dis-je alors que j'observais le corps de l'homme bâti comme le roc d'une montagne. Avec ce physique, et même si je ne l'avais jamais vu à ce jour, il devait s'agir d'un shinobi, retraité ou non, du Village.

Une bonne... Ou une mauvaise nouvelle, c'était selon.



M'adressant à nouveau la parole, d'un ton plus posé et apte au dialogue, j'entrevis tout de même dans ses intentions quelque chose de sous-jacent et de non dit. Des propos un peu trop protecteurs à l'encontre de son petit frère fautif, qui ne pouvait cacher que plus de culpabilité encore que celle qui avait été avérée jusqu'à présent. Le plus âgé en voulait au plus jeune, c'était évident vu le volume sonore utilisé pour le réprimander... Mais pouvait-il s'en tirer à si bon compte, alors que je ne savais même pas encore quel genre de larcin avait été commis, ni si il s'agissait là du seul délit perpétré par le jeune homme ? Je me voyais obligé, bien malgré moi, de pousser plus loin l'enquête, et, d'une manière générale et logique, d'appliquer la loi aussi justement que possible. Ainsi, après avoir brièvement fait peser un silence dans la salle, je repris la parole tout en fixant tour à tour les deux protagonistes:



"Hrum, et bien, je crains que ce ne soit pas aussi simple Monsieur, j'en suis désolé. Votre frère a commis un délit, d'une ampleur encore indéterminée, et il est de mon devoir de l'amener au poste de police pour qu'il réponde du chef d'accusation dont je leur ferais part. Je ne le chargerais pas de délit de fuite, car après tout je l'ai poursuivi sans qu'il ai eu d'abord connaissance de ma filature.

Dans tous les cas, ce jeune homme va devoir m'accompagner... Je peux compter sur votre coopération à tous les deux ?"



A ces mots, j'envisageais le pire, comme le meilleur, fixant plus particulièrement mon attention sur le grand frère protecteur qui ne prendrait peut être pas la nouvelle de bon coeur... Et en plus, je l'avais fait saigner du nez. Combinaison plus que bancale, si je supposais qu'il était d'un tempérament bagarreur. Comment cela allait-il bien pouvoir se passer ?

Comme je l'avais craint quelques instants plus tôt, mon interlocuteur principal ne sembla pas du tout enclin à coopérer de la manière que j'aurais espéré. Pas du tout même... Enfin, il avait le mérite d'être très clair dans ses propos, et ne laisser planer aucune ambiguïté quand à ses intentions, au moins, c'est ce que je me dis sur le moment. Mais, déclinant silencieusement une dernière fois sa "proposition d'accord", je réalisais que la situation allait quand même devenir vite assez ingérable, pour une vulgaire histoire de vol à la tire. L'homme, à la musculature assez marquée, devait être Chuunin, au minimum, et son petit frère, resté muet jusque là, peut être par peur d'une rouste venant de son aimant fraternel, avait déjà prouvé qu'il était capable de courir vite, très vite. Que faire ?

La situation semblait mener inévitablement à un étalage de violence inutile, mais avant tout je devais éviter que quiconque soit blessé dans l'histoire. Appréhender un voleur, et le ramener inconscient, voir souffrant de blessures, serait très mal vu. Quand au grand frère... Quel que soit son appartenance, ou son grade, s'il faisait obstacle à la justice, il devrait encourir la peine adaptée. Cela me donnait déjà plus de marge de manoeuvre à son encontre, sans toutefois régler mon problème principal...



Tel une ruelle de western, la salle s'était muée au silence total, et personne ici présent ne bougeait le moindre pouce, attendant que la partie adverse fasse le premier mouvement. Je lançais un dernier regard chargé de diplomatie vers l'homme qui se disait Shinobi, qui se vit aussi vite repousser par un haussement de sourcils caractéristique, qui définissait un homme résigné et décidé. Tant pis... Ca allait être à moi d'ouvrir le bal futile des hostilités, soucieux d'avoir un mouvement d'avance sur mes adversaires. Sans changer d'appuis, je joignis les mains, composant à toute vitesse une série de sceau. A mes côtés, deux clones aqueux apparurent, affichant le même air fatigué d'avance par ce qui allait suivre que moi. Je ne savais pas voir le futur immédiat, mais je devinais assez bien que la zone allait vite se muer en grand bazard organisé... plus ou moins.




Marquant le réel début des hostilités, mes deux clones bondirent en direction du gaillard aux tendances kleptomanes, tout deux prêts à s'en saisir le plus vite possible pour l'amener au poste de police. Je profitais du mouvement pour composer quelques signes supplementaires... Puis me plaçais directement en face du Shinobi roublard, lui intimant le plus sérieusement du monde qu'il allait être contraint de laisser la lois se charger de son frère. En aucun cas je ne levais la main sur lui, auquel cas j'aurais été en tord, même après qu'il ait annoncé le combat à venir.



" Monsieur, restez calme je vous prie, et faites vous à l'idée que votre frère va devoir se présenter au poste ! Vous n'êtes encore coupable de rien ! "



Prudent, mais déterminé à mettre fin à l'affaire au plus vite, j'avais encore l'espoir que mon vis-à-vis change d'avis, et se fasse une raison... Mais la précaution dont je m'étais encquéri témoignait tout de même d'un certain manque de foie en cette possibilité. Et mes bunshin n'auraient pas trop de leur léger surnombre pour attraper le petit criminel, agile comme un babouin des contrées du Sud. Ca commençait bel et bien à tourner au vinaigre, mais... Etais-je si naïf que j'eu cru que cela puisse se passer autrement ?