Sanjy passa les mains derrière la tête et soupira. La chaleur se dissipait au fil que les minutes passaient en cette fin de journée. Le blondinet était assis sur la terrasse d’un café. Un garçon vint poser face au jeune homme aux sourcils arrondis un sandwich et une chope de bière que le client avait commandé quelques instants plus tôt. Sanjy remercia le serveur, saisit son sandwich dans la main gauche et sa chope dans la main droite avant de poser ses pieds sur la table avec une nonchalance défiant toute concurrence. Ses voisins de table l’observèrent avec des airs différents allant de l’amusé à l’offusqué. Mais évidemment, si cette piètre manière de se tenir en public gênait certains clients, aucun membre du personnel du restaurant ne fit la moindre remarque au réputé juunin qu’était Sanjy Urashima.
Sanjy était assis seul à sa table. Il observait sans discrétion les décolletés et minijupes qu’il apercevait dans la rue (pour ne pas dire qu’il les cherchait du regard). Cependant, pour une fois, le séducteur s’en tint à l’innocente contemplation des rondeurs féminines. Malheureusement pour lui, l’heure n’était pas à la fête. Elle était même plus au supplice qu’autre chose. En effet aujourd’hui il allait rencontrer une des plus énervante bestiole du village caché du sable : l’élève ! Si sa formation à lui était terminé depuis bien longtemps et qu’il n’avait pas été impliqué dans une relation professeur-élève depuis des années, la nouvelle génération de ninjas du village demandait avec empressement un apprentissage du métier et à l’heure où les juunins se faisaient rare à Suna, Sanjy était envoyé à son plus grand regret sur le front de la bataille pour l’éducation.
On lui confiait aujourd’hui un genin du nom de Kaminari Machinchose… Enfin bon un truc dans le genre. Sanjy allait devoir entraîner ce garçon, l’accompagner dans certaines missions, lui apprendre plein de nouvelles techniques et ainsi lui permettre d’avancer dans sa carrière de ninja. Rien que de savoir que la plupart de son temps libre allait devoir être consacré à un shinobiot (manière dont il appelait les petits shinobis) le faisait frissonner d’horreur. Heureusement pour le blondinet, il existait une échappatoire. Si le genin se montrait particulièrement mauvais, le jeune homme aux cheveux blonds pourrait toujours le convaincre qu’il n’était pas fait pour être ninja.
Son bandeau ninja attaché au bras pour permettre à son futur élève de le reconnaître, Sanjy attendit en finissant sa chope de bière l’arrivée de Kaminari Kuroshi.

*Allez ramène ta fraise Kaminari...*

Les minutes passaient et la personne attendue n’arrivait toujours pas. Ca commençait mal.

*Putain on leur apprend pas la ponctualité à l’école de nos jours ?!*

Malgré la chope de bière qu’il venait de vider et les trois autres qu’il avait traité de la même manière pendant qu’il attendait son futur disciple, Sanjy était d’humeur grognonne. Lui-même était rarement ponctuel mais aujourd’hui, toutes les excuses étaient bonnes pour en vouloir à l’élève qu’on lui confiait. Le non respect de la ponctualité, le fait d’être assez faible pour avoir besoin d’un maître, les testicules. Un garçon… Pfff. Au moins avec une fille, le blondinet aurait pu mater les rondeurs et les attributs féminins de son élève pendant l’entraînement. Avec un garçon, il serait obligé de regarder pour de vrai les performances du genin. Alala… Mais qu’avait donc fait le juunin pour mériter ça ? Le punissait-on pour son manque évident de respect des valeurs conventionnelles des shinobis ou était-ce simplement le Destin qui s’acharnait sur lui ?
Puis l’homme tant attendu arriva. Un ado arrivant au terme de sa puberté tout vêtu de bleu avec des cheveux noirs. Un garçon étrange. Ses vêtements étaient pratiquement tous déchirés et il n’avait qu’un gant. Un aigle était posé sur son épaule.

*Okaayyy.*

Bon après tout ça aurait pu être pire. Il aurait pu tomber sur un gamin de 10 ans à peine capable d’épeler son nom correctement. Et puis cette manière d’arrivée de façon pas du tout présentable était peut-être un truc « à la mode » chez les jeunes. Maintenant que Kaminari se tenait devant lui, Sanjy décida de lui donner sa chance et le bénéfice du doute pendant qu’il se présentait et expliquait de manière tout à fait pathétique son retard.
Le jeune homme aux cheveux blonds, réalisant que ses pieds masquait sa vue, les enleva de sur la table et sourit. Il observa alors silencieusement Kuroshi et alluma une cigarette. Après avoir inspiré puis expiré un petit nuage de fumée, le juunin prit la parole.

« Okay. Et bien Kaminari Kuroshi, je m’appelle Urashima Sanjy et je serai a priori ton nouveau sensei. En conséquent, tu ne pourras désormais plus que m’appeler par les noms suivants : Sensei, Urashima-sensei, Urashima-sama, Maître, Grand Maître, Grand Maître Urashima et finalement Génialissime Urashima. Parlons maintenant de ton manque évident de sens de ponctualité. Les seules raisons pour lesquelles un retard de ta part peut être pardonné sont les suivantes : tu me ramènes les coordonnées d’une fille notée 8/10 ou plus d’après un barême dont je t’expliquerais plus tard les détails, tu me ramènes de la boisson en quantité suffisante pour me cuiter trois fois, tu as crédité mon compte en banque de 1000 ryos. Comme tu ne connaissais pas les règles aujourd’hui, on va dire que tu es puni et que tu devras payer ma consommation. Et d’ailleurs en parlant de ça… »

Sanjy leva le bras pour alerter un serveur avant de commander deux bières. Il reprit alors son souffle et fixa son disciple quelques secondes.

« Et oui tu m’as bien entendu. Je ne connais pas tes antécédents en ce qui concerne l’alcool mais à partir d’aujourd’hui, quand je veux pas boire seul, tu bois. Revenons maintenant à cette histoire d’enseignement. Je sais ce que tu te dis : la vie est injuste avec toi parce qu’elle t’as conçue sans la moindre qualité et aujourd’hui on te confie à un professeur et tu te dis « Mais, est-ce que ça sert vraiment à quelque chose ? ». Et bien coup de bol pour toi, le destin a été clément et t’as mis sur la route d’un des plus prodigieux shinobis de sa génération. Et oui et oui c’est bien de moi dont on parle. Alors j’ai finalement pas grand-chose d’autres à te dire que profite, parce qu’il y a du monde qui aimerait bien être à ta place aujourd’hui. »

Il était assez étrange de voir comment des phrases simples et courtes devant ses supérieurs se transformaient en de longs monologues devant des apprentis. Sanjy adorait étaler sa supériorité lorsqu’il en avait l’occasion. Il ne cachait dans ses discours rien de la flatteuse opinion qu’il avait de lui-même.
Le serveur apporta alors les deux boissons commandées quelques instants auparavant et les déposa devant les deux shinobis.

« Bon si tu avais des plans pour ce soir, annule tout. Je t’ai préparé une petite surprise. Mais avant j’aimerais que l’on discute tout les deux pour faire connaissance. J’aimerais que tu me parles un peu de toi. Pourquoi tu es ninja ? Quelles sont tes ambitions ? Qu’est-ce que tu attends de notre relation ? Si tu as des trucs à me dire, profites en parce que c’est pas tous les jours que je daignerais te prêter une oreille. »

Sanjy fixa le jeune ninja et se gratta la nuque. Ce gamin était plus intéressant qu’il n’en avait l’air. Même s’il avouait n’être pas un grand buveur, son goût pour les femmes pourrait se révéler utile pour la suite des évènements. Si ce genin ne se révélait pas être totalement mauvais en combat et dénué de tout cerveau, le juunin arriverait sans doute à en faire quelque chose de pas trop mal.
Le blondinet tira alors un coup sur sa cigarette et pointa du pouce sans se retourner la jolie fille que Kuroshi avait accompagné du regard.

« 7/10. Très joli visage et fesses correctes. Dommage qu’elle soit un peu plate et qu’elle ait cet horrible tatouage entre les jambes. »

Perdu quelques secondes dans ses souvenirs, Sanjy frissonna en repensant à cette terrible mésaventure d’il y a quelques mois. Après être revenu à lui, il but à grandes gorgées une bonne moitié de sa bière.

« Bon point pour toi : t’es pas trop coincé. Je devrais donc être capable de t’apprendre à vivre comme un homme. »

Finalement ce ne serait peut-être pas aussi inintéressant que ça d’avoir un élève. Une fois qu’il lui aurait appris à se saper correctement, cet élève pourrait lui servir de copilote à la conquête des femmes. En plus, avoir un élève à côté de lui ne faisait que renforcer l’idée que Sanjy était un grand ninja d’importance.
Sanjy secoua alors la tête. Non il fallait qu’il arrête de penser aux femmes et à lui-même un instant. Ce soir il était là pour rencontrer son élève. Il avait fait la résolution d’au moins faire semblant de s’intéresser à une relation professeur/élève entre les deux hommes. Il était temps de revenir à la véritable affaire de la soirée. Mais revenir à ce thème ne faisait malheureusement revenir en lui que l’aigreur et la mauvaise humeur.

« Mais oublions les femmes et ta rouquine un instant. T’as pas répondu à mes questions. Pourquoi tu veux être un ninja ? Est-ce que c’est pour faire comme Maman et Papa et pour que Maman et Papa soient fière de toi ? Ou est-ce que c’est parce que t’as pas grand-chose dans le crâne et que le village a rien trouvé de mieux à faire avec toi que de te former pour que tu meures dans d’atroces souffrances sur un champ de bataille ? »

Sanjy écoutait son futur élève commencer à répondre à sa question. Commencer était bien le mot. Car au plus grand malheur de la faible patiente de Sanjy, Kuroshi était apparemment le genre de gars à traîner autour du pot pendant vingt minutes avant de répondre aux questions qu’on lui posait. Enfin bon, il avait quand même daigner donner un minimum d’information sur lui-même qui en disait déjà long sur son passé et ses ambitions. Le seul point qui intéressait vraiment, ou plutôt qui n’ennuyait pas totalement le blondinet était le fait que le genin disait venir du pays de la brume. En tant que membre d’une famille enracinée à Suna et dévouée à son village depuis des générations, Sanjy avait beaucoup de mal à comprendre pourquoi les gens de ce monde étaient si souvent habités par l’envie de quitter leur pays pour venir s’installer dans un autre village.
Fixant son disciple avec un intérêt à moitié sincère, Sanjy continua de boire sa bière et de fumer sa cigarette en silence. Kuroshi buvait aussi. Bien. Le juunin n’aurait pas vraiment su quoi faire d’un garçon ne connaissant pas les bienfaits de la boisson. En plus de ça, l’élève se montrait assez respectueux. Parfois même flatteur. Tant mieux. Le juunin préférait largement ça à un jeune insolent se croyant plus fort que lui.
Ah vraiment ! Sanjy aurait presque pu apprécier cet adolescent si celui-ci n’avait pas cette fâcheuse habitude de ne pas répondre correctement aux questions qu’on lui posait. Le jeune homme aux cheveux blonds prit alors la parole le sourire aux lèvres avec un ton qui se durcit au fil de ses paroles.

« Laisse-moi deviner, ton ambition dans la vie c’est de… Mais qu’est-ce que je fais là ? Je joue aux devinettes avec toi ? Tu crois vraiment que j’ai le temps de jouer à ça ?! »

C’est à ce moment là que Sanjy aperçut le détail qui lui fit comprendre qu’il était temps de s’éclipser. Ce même serveur qui lui avait apporter toutes ses consommations depuis le début de la soirée s’approchait à grand pas de sa table avec l’addition en main. Le juunin se leva alors soudainement.

« Bon bizuth on va faire un truc pour voir si t’es pas un trop gros boulet. Moi je pars et toi tu me retrouves. Profites-en pour réfléchir un peu aux questions que je t’ai posé pour que tu puisses me répondre sans que j’aie à te questionner pour te faire cracher chacun de tes mots. Allez à plus !»

Un petit clin d’œil, un beau sourire et un coup de Shunshin no jutsu et voilà que le juunin, le verre à la main, disparut soudainement du champ de vision de son élève. Seul un petit papier était resté au même endroit où se tenait quelques secondes auparavant le blondinet. Sur ce papier était inscrit des numéros.

Citation :

18.5.20.18.15.21.22.5 13.15.9 1.21 16.1.18.3